J’étais seul chez moi, bien seul je vous assure,
Mes « hihans » résonnaient entre mes quatre murs.
Puis elle est arrivé pendant une crise de foin,
Nul malentendu, je vais en prendre soin.
Je n’vais pas l’adopter, c’est à elle de choisir.
Bon d’accord je l’emmène, je serai son loisir.
Son attrait naturel ? Les pelotes de laine.
Mon allergie m’inspire. Son nom sera Pollen.
De sa queue en virgule à ses griffes acérées,
J’avais un bout de rien dans mes bras à serrer.
Mon petit quotidien avait soudain changé,
« Devoir rentrer chez moi », je devais y songer.
Entrouvrir la fenêtre ou bien l’ouvrir tout court,
A chacun de mes gestes, elle me donnait un cours.
Je devais m’arrêter de travailler pour elle,
Obligé de savoir quand elle se faisait belle.
Le soir sur mon plumard, j’attendais qu’elle se pose,
Ne plus bouger les bras mais la jambe si j’ose.
Elle attendait sag’ment le clin d’une paupière
Pour miauler violemment « J’ai faim depuis hier ! »
Seulement le destin n’était pas notre ami,
Il lui a fait du mal, je n’en suis pas remis.
Je suis seul chez moi, bien seul je vous assure,
Mes « hihans » déraisonnent entre mes quatre murs,
Je m’attends à entendre crier dans chaque coin
Des plaintes plutôt tendres, mais elles sont déjà loin.
Ne plus être suivi enlève le plaisir
De se voir zigzaguer où son chat le désir.
Ouvrir une fenêtre devient une triste scène,
Aucun plaisir pour moi, car la joie était sienne.
De sa queue en virgule à ses griffes acérées,
Reste des particules, trop peu pour les serrer.
Mon petit quotidien a de nouveau changé,
« Pourquoi rentrer chez soi ? » n’est pas tant imagé.
Un an passé ici semble soudain trop court,
Drôle collocation aux dialogues de sourds.
Je ne m’arrêterai plus de bûcher pour elle,
Sauf si, parfois, la nostalgie s’en mêle.
Et la nuit arrivant, je suis alors tout chose.
« Quoi faire de mes jambes ? », le problème se pose.
Au matin le réveil se fait par la lumière,
Pas de plainte et pourtant, je préférais hier.
Mon « chez moi » a perdu la maîtresse de ses lieux
Un silence a chassé ses « miaous » vers les cieux.
Lors du dernier échange, elle semblait le savoir,
D’un mot félin pour l’autre, j’ai miaulé « au revoir ».
L’allergie est partie pour un an tout au mieux.
Pollen l’a suivi mais m’a fait ses adieux.
Petit à petit, elle s’est sentie chez elle
O début il est vrai, l’étable lui était cruelle.
La chauffeuse la couvait le jour désespéré
L’âne la réconfortait une fois la nuit levée.
Enfin elle osa retourner l’étable,
Non sans coup de carotte affable.
Pas facile à tenir, une vraie toupie,
O moins, l’âne est sans ennui
L’étable remplie, on se réjouit
L’allergie se fait des amis.
Elle gambadait au voisinage jour et nuit
Nul n’a pu l’empêcher d’aller au paradis.
Epitaphe
On faucha – ô, ma peine –
Au volant et sans frein
La fine châtelaine
Pas plus grosse qu’un grain
Le départ de Pollen
A semé du chagrin.
Au départ on pense à quelques vers, comme pour rendre hommage.
Et puis on se rend compte qu’on n’arrivera pas, définitivement, à extraire ces deux ou trois belles phrases qui pourraient témoigner de l’émotion ressentie.
Pas même un seul mot.